Notre relation semblait repartir de plus belle. Pendant environ
un mois tout était parfait. Or je sentais que quelque chose flottait dans
l'air. J'avais apparemment refoulé la conversation et l'accord sur sa nouvelle
façon de vivre sa sexualité au fond de mon inconscient. Ce n'était pas pour
rester ainsi si longtemps, car la grande première approchait à grandes
enjambées.
Un soir, après le dîner, Caroline m'a demandé s'il pouvait
sortir le vendredi qui venait.
Au début, je n'ai pas réalisé ce qu'elle sollicitait
vraiment. Alors que j'étais en train de lui donner une réponse j'ai compris. Elle
rougit et balbutia : « Ce n'est pas ce que je voulais dire. Je? »
Ses mots s'éternisèrent. Soulagé par son embarras évident, je l'interrompis. « Je pense que je sais tes intentions. Oui, tu peux. »
Ce fut une semaine interminable jusqu'à ce fameux vendredi.
Ce jour-là j'ai passé la journée au bureau. Mais si mon
corps était bien présent, mon esprit était ailleurs. Quand je suis rentré à la
maison, Caroline préparait le dîner. C'était un mirage, une vision de la
normalité domestique qui ne correspondait pas à ce qui arrivait. J'errais
derrière elle comme un chiot perdu, mon estomac se retournait dans tous les
sens. Ce ne fut qu'à cet instant que toutes les implications de notre
arrangement se firent sentir, et ce n'était pas agréable.
Elle s'est douchée, rasée et épilée. Les cheveux coiffés, le
visage apprêté de maquillage. Lingerie fine, jupe, chemisier et
chaussures ; elle avait l'allure des grands soirs. Elle avait le regard
emplit de nervosité quand elle a demandé : « Es-tu sûr de ça ? »
Honnêtement je n'étais sûr de rien. J'ai partagé mon
inquiétude en toute franchise :
? Je ne suis sûr de rien, sauf de t'aimer.
Elle débordait d'émotion. J'ai poursuivi : « Je t'aime mais
j'ai besoin que tu sois heureuse, je veux que tu sois satisfaite, et je sais
que c'est un domaine dans lequel je ne peux pas faire grand-chose pour toi. Je
sais aussi que c'est notre dernière chance d'être ensemble. Je serai là quand
tu reviendras. Au fait, tu es fantastique. »
Avec ce dernier commentaire, les larmes sont finalement
venues. Ce n'était pas quelque chose à laquelle elle était encline. Je l'ai
embrassée. Au bout d'une minute environ, elle se tourna vers le miroir.
? Je ne ressemble à rien, dit-elle en se saisissant d'une
lingette pour le visage pour nettoyer le mascara qui coulait.
Elle s'est remaquillée et, sans mot dire, est partie.
Les quatre heures suivantes ont été les plus longues de ma
vie. J'ai essayé de regarder la télé. J'ai surfé sur Internet. J'ai même pris
la voiture jusqu'à son appartement et je me suis assis dehors pendant un
moment. Rien ne pouvait me faire oublier ce qui se passait. Rien ne pouvait
enlever la nausée au creux de mon estomac. Je suis rentré chez moi, je me suis
douché puis couché au lit.
Il était un peu plus de minuit quand j'entendis la voiture
s'arrêter devant la maison. Le moteur qui se coupe, la clé dans la porte, les
pas de Caroline dans le couloir se dirigeant vers le salon. Toutes les sensations
sont encore présentes. C'est un bon quart d'heure plus tard que je l'ai
entendue monter les escaliers. Au lieu d'entrer dans notre chambre, elle s'est
retournée et est entrée dans la chambre d'amis qui servait également de
dressing. J'ai attendu. Je pouvais l'entendre bouger, puis le silence. J'ai
attendu encore cinq minutes et j'ai réalisé qu'elle ne viendrait pas
d'elle-même.
Lorsque j'ai ouvert la porte, Caroline était au lit. Je l'ai
rejointe. Elle ne bougea pas. Me déplaçant à travers le lit jusqu'à elle, j'ai
mis mon bras autour d'elle, nos corps serrés l'un contre l'autre, puis embrassé
son épaule.
? Je t'aime, dis-je doucement.
À ce moment-là, je voulais juste la protéger. Elle n'a pas
répondu, mais je sais qu'elle pleurait très doucement ? ??essayant de masquer
ses larmes. Nous sommes restés dans cette position pour le reste de la nuit.
Le lendemain soir, comme convenu, nous avons eu la
conversation au sujet de son escapade. Le sexe avait été bon mais, à cette rare
occasion, elle n'avait pas eu d'orgasme car elle ne pouvait pas complètement
lâcher prise. Mon instinct m'a dit que c'était un mensonge, un mensonge pour me
faciliter la tâche, un mensonge avec lequel je pouvais vivre. J'ai aussi un peu
modifié la vérité en lui disant que j'avais été dur toute la nuit malgré
l'inquiétude et le doute, mais en minimisant la soirée difficile que j'avais
vécue.
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